L'Enigme du don

L'Enigme du don

Maurice Godelier

Language: French

Pages: 0

ISBN: 2080800493

Format: PDF / Kindle (mobi) / ePub


Pourquoi doit-on donner, pourquoi doit-on accepter ce que l'on vous donne, et, quand on a accepté, pourquoi faut-il rendre?

Cet ouvrage évalue le rôle et l'importance du don dans le fonctionnement des sociétés et dans la constitution du lien social.

Le terrain, bien entendu, n'était pas vierge: Marcel Mauss, le premier, l'avait défriché allant jusqu'à avancer l'idée que si les choses données sont rendues c'est qu'il y a dans la chose donnée un esprit qui la pousse à revenir entre les mains de son donateur originaire. L'hypothèse valut à Mauss la critique sévère de Claude Lévi-Strauss, qui lui reprocha d'avoir pris une théorie indigène pour une théorie scientifique et d'avoir manqué de reconnaître pleinement le fait que la société humaine entière est échange et que pour en comprendre le sens il faut partir du symbolique et de sa primauté sur l'imaginaire et le réel.

La perspective générale adoptée par Maurice Godelier renouvelle profondément notre compréhension du don. Il analyse en effet les choses qu'on donne ou celles qu'on vend à partir des choses qu'on ne donne pas ou ne vend pas, des choses qu'on garde et que l'on doit garder, au premier rang desquelles les objets sacrés. Réanalysant les pratiques du potlatch et du kula sur lesquelles Mauss s'était appuyé, il montre que les énigmes auxquelles Mauss a été confronté se dissipent lorsque l'on comprend qu'il est tout à la fois possible de donner un objet et de le garder. Ce qui est donné, c'est le droit d'en user pour d'autres dons, ce qui est gardé c'est la propriété, inaliénable. Mais il faut encore expliquer pourquoi cette règle de droit s'applique aux objets précieux qu'on donne et non aux objets sacrés qu'on garde. La chose s'éclaire lorsqu'on fait apparaître ce qui est enfoui dans l'objet, l'imaginaire associé au pouvoir.

Il apparaît donc que toute société renferme deux ensembles de réalités: les unes, soustraites à l'échange, aux dons, au marché, constituent autant de point fixes nécessaires pour que les autres circulent. Et c'est précisément la redéfinition des ancrages fondamentaux du fait social qui constitue la tâche majeure de la pensée politique aujourd'hui.

Ancien directeur scientifique du Département des sciences de l'homme et de la société du CNRS, Prix international Alexander von Humboldt en sciences sociales, Maurice Godelier est directeur d'études à l'EHESS où il dirige le Centre de recherche et de documentation sur l'Océanie. Il a publié deux livres chez Fayard: La Production des Grands Hommes (1982), qui a reçu le Prix de l'Académie française, et L'Idéel et le matériel: Pensée, économies, sociétés (1984).

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aux demandes des humains, il faut que celles-ci leur soient adressées dans une langue et selon des procédures entendues et attendues. C'est pour ces raisons qu'à nos yeux il ne peut être vraiment question entre les grands dieux et les hommes de véritables �contrats», et que nous ne pensons pas comme Mauss que le sacrifice soit dans son essence profonde un contrat entre les hommes et les dieux. Et encore moins que par sa forme, le sacrifice se rapproche du potlatch sous prétexte que � ces dieux

fallait garder l'empereur mais transformer la monarchie de droit divin en monarchie constitutionnelle, à l'européenne7. Ce fut leur position qui l'emporta. Et pour la première fois dans l'histoire on vit un dieu vivant sous forme humaine forcé d'avouer qu'il n'était pas dieu. Tel est le contenu du rescrit que l'empereur Hirohito fut contraint de rédiger le 1er janvier 1946 et dont il adressa le texte (en langue anglaise) au général MacArthur, chef de l'armée d'occupation : � Les liens entre Nous

et toutes ces survivances considérables de ces traditions dans les sociétés proches de nous ou dans des usages des nôtres échappent aux schèmes que donnent d'ordinaire les rares économistes qui ont voulu comparer les diverses économies connues133.» Et Mauss de préciser qu'il ajoute ses efforts à ceux de Malinowski qui a consacré �tout un travail à faire sauter les doctrines courantes sur l'économie "primitive"134». Mais Mauss n'estime ni suffisant le travail de démolition critique de ces

instituer simultanément un double rapport entre celui qui donne et celui qui reçoit. Un rapport de solidarité, puisque celui qui donne partage ce qu'il a, voire ce qu'il est, avec celui à qu'il donne, et un rapport de supériorité, puisque celui qui reçoit le don et l'accepte se met en dette vis-à-vis de celui qui lui a donné. Par cette dette il devient son obligé, et donc se retrouve jusqu'à un certain point sous sa dépendance, du moins pour tout le temps où il n'aura pas � rendu � ce qu'on lui a

précisait qu'il y avait deux feux, l'un pour les prêtres et l'autre pour la sœur du chef du clan possédant ce territoire de chasse, sa présence attestant ces droits. Annette Weiner a reproché à Marshall Sahlins d'avoir coupé ce passage et fait ainsi disparaître cette femme de la scène et l'importance politico-religieuse des femmes dans cette société. (Cf. A. Weiner, � Inalienable Wealth», American Ethnologist, 12 (2),1985, pp. 210-227.) 80 Ibid., pp. 6, 8 et 9. C'est nous qui traduisons. 81

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