L'invitée

L'invitée

Simone de Beauvoir

Language: French

Pages: 338

ISBN: 207020507X

Format: PDF / Kindle (mobi) / ePub


"Je me sens coupable, dit-il. Je me suis reposé bêtement sur les bons sentiments que cette fille me porte, mais ce n'est pas d'une moche petite tentative de séduction qu'il s'agissait. Nous voulions bâtir un vrai trio, une vie à trois bien équilibrée où personne ne se serait sacrifié : c'était peut-être une gageure, mais au moins ça méritait d'être essayé ! Tandis que si Xavière se conduit comme une petite garce jalouse, si tu es une pauvre victime pendant que je m'amuse à faire le joli cœur, notre histoire devient ignoble."

Le Misanthrope

Terra Amata

Micromégas ; Zadig ; Candide

Our Lady of the Flowers

Lectures de Proust

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

acte de foi, c'est un pari. – C'est tout pareil. Xavière eut une petite moue. – C'est comme ça que Canzetti et Éloy se consolent. – Oui, ça fait des mythes de compensation, c'est écœurant, dit Françoise. Mais il ne s'agit pas de rêver, il s'agit de vouloir, c'est différent ! – Élisabeth veut être un grand peintre, dit Xavière, c'est du joli. – Je me demande, dit Françoise ; j'ai l'impression qu'elle met le mythe en action pour mieux y croire, mais qu'elle n'est pas capable de rien vouloir

dit-elle. Xavière effleura de ses doigts une mèche soyeuse. – Je ne me suis pas lavé les cheveux, dit-elle étonnée. – Ils sentent la pharmacie, dit Françoise. Xavière eut un sourire d'intelligence, qu'elle réprima aussitôt. – Je n'y ai pas touché, répéta-t-elle. Son visage s'assombrit et elle alluma une cigarette d'un air un peu fatal. Françoise posa doucement la main sur son bras. – Comme vous êtes morne, dit-elle. Il ne faut pas vous laisser aller comme ça ! – Qu'y puis-je ? dit

Elle sourit et son sourire se perdit dans le vide ; Pierre fumait sa pipe tout ratatiné sur lui-même ; Xavière avait l'air tout juste poli. Françoise se sentit ridicule, mais elle poursuivit avec une animation têtue. On lui faisait une drôle de culture à ce gosse, il connaissait à fond le surréalisme sans avoir jamais lu un vers de Racine ; il était touchant parce que pour combler ses lacunes il allait dans les bibliothèques compulser des géographies et des arithmétiques en bon petit

découvraient à elle, comme les touffes de gui et de houx suspendues aux cintres, elles ne lui appartenaient pas davantage. – Je ne suis personne, pensa Françoise ; souvent elle s'était sentie fière de n'être pas enfermée comme les autres dans d'étroites petites limites individuelles : une nuit, à la Prairie, avec Élisabeth et Xavière, il n'y avait pas si longtemps. Une conscience nue en face du monde, c'est ainsi qu'elle se pensait. Elle toucha son visage : ce n'était pour elle qu'un masque

l'air de bien partir. – Élisabeth m'en a parlé, dit Françoise. – C'est elle qui m'a présenté. Elle fait la pluie et le beau temps dans la maison. Il porta la main à sa bouche d'un air ravi et scandalisé : – Non, mais, ce qu'elle la ramène à présent, c'est pas croyable ! – Elle est pleine aux as, on parle un peu d'elle ; ça lui change la vie, dit Françoise. Elle est devenue formidablement élégante. – J'aime pas comme elle s'habille, dit Gerbert avec une partialité décidée. C'était drôle de

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